Rapport Olivennes : indigeste et indigent
Saluons tout de même le principal résultat de la Mission Olivennes : l’abandon des mesures techniques de protection. Même si cet abandon n’est pas définitif.
En signant, en grandes pompes à l’Elysée, en présence de Nicolas Sarkozy l’Accord pour le développement et la protection des œuvres et programmes culturels sur les nouveaux réseaux, l’industrie musicale française, majors (SNEP) et labels indépendants (UPFI) s’est engagée « à rendre disponibles, dans un délai maximal d’un an à compter du fonctionnement effectif du mécanisme d’avertissement et de sanction, les catalogues de productions musicales françaises pour l’achat au titre en ligne sans mesures techniques de protection, tant que celles-ci ne permettent pas l’interopérabilité et dans le respect des droits et exclusivités reconnus”.
Certes, l’abandon est conditionnel : “il ne prendra effet dans un délai maximal d’un an à compter du fonctionnement effectif du mécanisme d’avertissement et de sanction”.
Et il n’est pas définitif : “ tant que celles-ci (les mesures techniques de protection) ne permettent pas l’interopérabilité et dans le respect des droits et exclusivités reconnus”.
L’industrie musicale revient ainsi sur la stratégie suicidaire qu’elle avait mise en œuvre depuis 10 ans : verrouillage des œuvres et sanction du contournement (via une directive arrachée au législateur européen).
L’industrie musicale reprend ainsi à son compte, après l’avoir longtemps contesté, le constat fait par la Mission Olivennes : « Il a paru évident à la mission que le manque d’attractivité de l’achat en ligne d’oeuvres musicales est très lié aux contraintes d’utilisation que les mesures techniques de protection imposent. L’achat d’une oeuvre numérique n’est intéressant que s’il permet la même liberté d’usage que le support physique. S’il n’existe pas de possibilité de conserver, en cas de changement d’ordinateur, les titres achetés pour former une bibliothèque personnelle ou s’il est impossible d’écouter cette musique sur le lecteur de son choix, le consommateur se refusera à acheter ».
Denis Olivennes, dans ses fonctions de PDG de la FNAC avait pu prendre la mesure des effets pervers des mesures techniques de protection : « Si vous prenez nos premiers titres vendus au format MP3, le groupe Aaron en novembre, nous avons multiplié par deux leurs ventes dans la première semaine de commercialisation par rapport à la précédente où ils étaient uniquement disponibles sous le format WMA, le DRM de Microsoft. Globalement, les gens achètent deux fois plus de musique en ligne si elle est sans DRM. Depuis des années, les majors campent sur des positions myopes et courtermistes, en sous-estimant d’abord les nouveaux modes de consommation de la musique via le téléchargement et en refusant de comprendre que leurs positions inflexibles les ont amenées dans le mur ».