McCain marie l’esthétique de Bruckheimer et l’éthique de John Wayne

La campagne de John McCain a diffusé hier un nouvelle vidéo : «Sacrifice». Elle inscrit McCain dans cette lignée d’Américains qui ont répondu à l’appel de la nation. Un montage se scénes de guerre, d’avions qui décollent d’un porte-avions (McCain était pilote dans la Navy), entrecoupé d’images du drapeau américain. Bref, un concentré de l’esthétique Bruckheimer…

En voix off, une étrange et sombre méditation sur la guerre, la fraternité qui relie les soldats, la vanité et la grandeur, le sacrifice et la gloire, le dépassement de soi.
Dans le chaos, la destruction et le choc de la guerre, le sens du devoir et la discipline militaire permettent aux soldats de supporter et surmonter les épreuves.
Leur devoir et fidélité appartiennent à leur pays. Ils trouvent consolation dans la foi en Dieu. C’est à travers la fraternité des armes qu’ils commencent à comprendre qu’aimer son pays, c’est aimer ses compatriotes, c’est en servant l’idéal national qu’a débuté leur transformation personnelle.

Cette vidéo se conclut sur un auto-portrait de McCain : » La gloire, c’est rester fidèle à quelque chose plus grand que vous-même, à la cause, à vos principes, aux personnes sur qui vous comptez, et sur qui vous pouvez compter. Aucun malheur, aucune blessure, aucune humiliation ne peut la détruire ».

Etrange vidéo, tout de même, qui exalte des valeurs martiales de dépassement et de sacrifice au service de la patrie, tout en reconnaissant que ce qui fait tenir les combattants face aux horreurs de la guerre, c’est la fraternité face à la menace de mort. Un thème omniprésent dans les films de combat qui, de « Objective Burma » à Bands of Brothers, en passant par « Il faut sauver le soldat Ryan », racontent la guerre à travers un petit groupe de combattants, un « platoon » emblématique à lui tout seul de toute la nation américaine (un Wasp, un polonais, un italien, un noir). C’est la solidarité face à l’ennemi qui relie entre eux les membres du « platoon ». « It’s about the man next to you »), comme le dit l’un des personnages de la Chute du Faucon noir.


Le script :

In the chaos, destruction and shock of war, soldiers are bound by duty and military discipline to endure and overcome. Their duty and loyalty belong to their country. They find solace in their faith in God. But their strongest loyalty, the bond that cannot break, is to the cause that is theirs alone — each other.
It is through loyalty to comrades in arms that they begin to understand that to love one’s country is to love one’s countrymen, and to serve the national ideal that commenced their personal transformation.
When war is over, they might have the largest but not exclusive claim on the success of their nation’s cause and seldom share in the blame for its failure. But their claim is shorn of all romance, all nostalgia for the suffering with which it was won. From that crucible they have but one prize, one honor: that they had withstood the savagery and losses of war and were found worthy by the men who stood with them. This is the truth of war, of honor and courage.

Before John McCain went to war its meaning was obscure to him, hidden in the spare language of men who had gone to war before him and been changed forever by the experience. The Naval Academy, with its inanimate and living memorials to fidelity and valor, tried to teach him this truth. But he had interpreted the lesson, as he had interpreted his father’s example, within the limits of his vanity. He thought glory was the object of war, and all glory was self-glory. No more. For he learned the truth: there are greater pursuits than self-seeking. Glory is not a conceit. It is not a decoration for valor. It is not a prize for being the strongest, the most clever, or the boldest.
Glory belongs to the act of being constant to something greater than yourself, to the cause, to your principles, to the people on whom you rely, and who rely on you in return. No misfortune, no injury, no humiliation can destroy it.

Mc Cain, War hero

Pendant que les démocrates poursuivent leur guerre fratricide, les Républicains s’attachent à sculpter l’image héroïque de McCain : expérimenté, courageux et patriote. McCain n’est pas homme à se rendre, ni à capituler : « we never surrender ».

Comme Ronald Reagan, qui reçut une balle qui faillit lui être fatale en 1981, il évoque un John Wayne insubmersible venant de l’ouest sauvage (il devient sénateur de l’Arizona en 1982) et refusant les conventions, comme le souligne Sylvie Laurent dans un remarquable portrait de McCain publié dans la Vie des Idées.

Cette premiére publicité à l’échelle du pays a pour titre « 624787 » : le numéro de matricule du soldat McCain. La vidéo s’ouvre sur un discours de campagne martial et se termine avec des images d’archives de McCain sur un lit d’hopital, aprés sa libération des camps de prisonniers vietnamiens. Interrogé, il décline son rang et son matricule : « lieutenant commander in the Navy, « 624787.« .

Cette vidéo mobilise les codes des bandes annonces hollywoodiennes, mêlant discours, couverture de Time (« A real hero ») et images d’archives de l’ancien prisonnier de guerre du Vietcong.

La campagne McCain avait largement mobilisé le registre du « war hero » durant la primaire face à Romney et Huckabey.

Brad Pitt et Angelina Jolie cousins éloignés d’Obama et Clinton

D’après la société de généalogie de Nouvelle-Angleterre (NEHGC), Barack Obama serait un un lointain cousin de Brad Pitt. Obama serait lié à six présidents américains : George Bush, George Bush père, Gerald Ford, Lyndon Johnson, Harry Truman et James Madison.

Hillary Clinton peut se prévaloir de liens de parenté avec Angelina Jolie, Madonna, Céline Dion, Alanis Morissette et Jack Kerouak.

John McCain ,est pour sa part cousin au sixième degré de Laura Bush.

West Wing Saison 8: Santos et Obama face à la question raciale

Barack Obama a prononcé le 18 mars à Philadelphie un discours-clé sur la question raciale aux Etats-Unis. Prenant ses distances avec les sermons de Wright, il a saisi l’occasion de cette controverse (la plus grave depuis son entrée en lice) pour aborder, en 37 minutes, sur le fond , la question raciale :

 » La race est une question que le pays ne peut pas, à mon avis, se permettre d’ignorer en ce moment. Le fait est que les commentaires qui ont été faits et les questions qui ont émergé au cours des dernières semaines montrent que la question raciale est d’une complexité que nous n’avons jamais assumée : c’est une partie de notre union que nous devons encore parfaire. Si nous évitons la question, si nous nous retirons dans nos coins respectifs, nous ne pourrons jamais nous unir. »

Il a appelé les Américains à « dépasser leurs vieilles blessures raciales ».

Difficile, pour les amateurs de West Wing, de ne pas penser au discours de Matt Santos dans l’église noire, aprés la mort d’un jeune noir, tué par un officier de police latino.

Pour ceux qui ne connaissent pas West Wing, ou qui n’ont pas vu la saison 7, cet épisode intervient à un moment-clé de la campagne de Matt Santos. Matt Santos s’est finalement imposé dans la primaire démocrate: c’est le premier candidat latino à la Présidence. Comme Obama, Santos refuse de se laisser « définir » et enfermer comme un candidat « ethnique ».  » I don’t want to be just the brown candidate : I want to be the American Candidate ».

De même qu’on s’interrogea sur les capacités d’Obama à conquérir le vote des latinos pendant les primaires, Santos ne fait pas le plein des voix dans l’électorat noir.

Dans l’épisode Undecideds (140) de la saison 7, son directeur de campagne recommande une démarche spécifique en direction des électeurs noirs: « We need 90% of black voters. We’ve got 81%. 12% of African-Americans are undecided in this race. The black vote’s never had undecideds, but they’re willing to hang back and weigh their options because they don’t hate Vinick and they’re not sure they like the whole idea of Santos. This is not a small problem ».

C’est dans ce contexte qu’intervient le meurtre accidentel d’un jeune noir (qui venait de voler une voiture) par un policier latino. Ses conseillers lui recommandent de rendre visite aux parents du jeune noir : cette visite tourne mal. Une partie de la communauté noire attend de Santos qu’il condamne fermement l’acte du policier latino. Le discours que Santos doit prononcer dans l’église, en présence des parents et des voisins du jeune noir, devient décisif pour le vote noir comme le vote latino.

Santos écarte le texte préparé par ses conseillers et improvise un discours dans lequel il commence par exprimer sa colère (que faisait ce garçon dans une voiture volée ? Ce policier avait il vraiment besoin de tirer ?)

« You know, I find myself on days like this casting around for someone to blame. I blame the kid, he stole a car. I blame the parents, why couldn’t they teach him better. I blame the cop, did he need to fire. I blame every one I can think of and I am filled with rage.

Avant d’en appeler à la compassion.

« And then I try and find compassion. Compassion for the people I blame, compassion for the people I do not understand, compassion. It doesn’t always work so well. I remember as a young man listening on the radio to Dr. King in 1968. He asked of us compassion and we responded, not necessarily because we felt it but because he convinced us that if we could find compassion, if we could express compassion, that if we could just pretend compassion it would heal us so much more than vengeance could. And he was right: it did but not enough.

What we’ve learned this week is that more compassion is required of us and an even greater effort is required of us. And we are all, I think everyone of us, are tired. We’re tired of understanding, we’re tired of waiting, we’re tired of trying to figure out why our children are not safe and why our efforts to try to make them safe seem to fail. We’re tired. But we must know that we have made some progress and blame will only destroy it. Blame will breed more violence and we have had enough of that.

Blame will not rid our streets of crime and drugs and fear and we have had enough of that. Blame will not strengthen our schools or our families or our workforce. Blame will rob us of those things and we have had enough of that. And so I ask you today to dig down deep with me and find that compassion in your hearts because it will keep us on the road. And we will walk together and work together. And slowly, slowly, too slowly, things will get better. « 

Téléphone rouge : la stratégie de la peur (3)

Dans sa riposte au clip du téléphone rouge de Clinton, Obama évoque à mots couverts le précédent fameux qu’avait constitué le spot télévisé diffusé par la campagne Mondale pour affaiblir et décrédibiliser Gary Hart lors des primaires démocrates de 1984. (Un spot qui s’inscrivait lui même dans la lignée du spot Daisy qui avait été le temps fort de la campagne télévisée de Lyndon Johnson en 1964).

Les partisans d’Obama ne s’imposent pas la même prudence. Plusieurs d’entre eux s’attelent en quelques heures à réaliser des spots qui enchainent le téléphone rouge de Clinton et celui de Walter Mondale. du télé

I am Jack Nicholson and I approve this message

Jack Nicholson avait apporté son soutien à Hillary Clinton il y a plusieurs mois avec une vidéo trés sobre.

« Depuis 35 ans, la sénatrice Clinton a proposé des solutions aux Américains. Elle n’abandonne jamais. Elle est rompue aux batailles électorales. Elle sera un solide commandant en chef. Elle a l’expérience pour faire face aux problèmes économiques actuels et futurs. C’est pourquoi, en ce moment important pour l’Amérique, j’apporte ma voix à Hillary Clinton. J’espère que vous me rejoindrez ».

L’énigmatique vidéo de Mike Gravel, le troisiéme candidat démocrate

Personne – ou presque – n’y prête attention,mais il y un troisiéme candidat en lice dans le camp démocrate, outre Hillary Clinton et Barack Obama.

Mike Gravel, un ex-sénateur de l’Alaska âgé de 77 ans reste dans la course pour promouvoir une « Initiative nationale ». Pour sauver le pays, il propose de modifier la Constitution pour introduire la démocratie directe et de soumettre toutes les législations au vote des citoyens.

La campagne de Mike Gravel connu un regain d’attention grâce à une vidéo énigmatique postée sur YouTube, vue prés de 500 000 fois.

On y voit Mike Gravel fixer la caméra, jeter une pierre dans un lac puis s’éloigner à grands pas. Sans prononcer un seul mot. Etrange.

Téléphone rouge : la riposte de l’équipe Obama (2)

La riposte du camp Obama au clip du téléphone rouge a été immédiate.

  • Barack Obama, quelques heures plus tard, à Houston, commentait le clip : « We’ve seen these ads before. They’re the kind that play on people’s fears to try to scare up votes …; Nous avons déja vu ce genre de spots dans le passé. Ils jouent sur la peur des gens. En fait, nous avons déjà eu le (test) du téléphone rouge, c’était la décision d’envahir l’Irak. Mme Clinton a donné la mauvaise réponse, George Bush a donné la mauvaise réponse. John McCain a donné la mauvaise réponse. Je me suis levé et j’ai dit qu’une guerre en Irak ne serait pas sage (…) C’est le genre de jugement dont je ferai preuve quand je répondrai au téléphone à la Maison Blanche »
  • Au même moment, l’équipe de campagne diffusait une vidéo similaire à celle de Clinton : un téléphone qui sonne dans la nuit et des enfants qui dorment. «Il est trois heures du matin et vos enfants dorment en sûreté. Il y a un téléphone qui sonne à la Maison-Blanche. Il s’est pasé quelque chose dans le monde. Votre vote décidera qui répondra à l’appel. Est-ce que le Président qui répondra ne devrait pas être celui le seul, qui a eu la capacité de jugement et et le courage de s’opposer à la guerre en Irak, depuis le début. C’est un monde dangereux, et c’est la capacité de jugement qui compte. »

Test du téléphone rouge : il est trois heures (1)

«Il est trois heures du matin et vos enfants dorment en toute sécurité. Un téléphone sonne à la Maison-Blanche. Il s’est passé quelque chose dans le monde. Votre vote décidera de qui répondra à l’appel. Sera-ce quelqu’un qui connaît les dirigeants du monde et l’armée, quelqu’un qui a été mis à l’épreuve (tested) et qui est préparé pour faire face à un monde dangereux ? Il est trois heures du matin et vos enfants dorment en toute sécurité. Qui voulez-vous au bout du fil?»

C’est la question posée par Hillary Clinton dans un nouveau clip mettant en cause la capacité de Barack Obama à réagir à une crise de sécurité. Dans le spot, on peut voir des enfants qui dorment, et les images suggèrent que les électeurs seraient plus rassurés avec l’épouse de l’ancien président Bill Clinton si une crise se produit quand les enfants sont endormis.

Cette vidéo s’imposera probablement comme l’un des temps forts du duel Obama-Clinton.

Cette vidéo est intéressante de plusieurs points de vue.

1. Ce spot s’adresse à l’électorat féminin, essentiel pour Hillary Clinton, alors qu’elle est en difficulté dans la course à l’investiture.

2. Il intervient à un moment clé du duel Obama-Clinton. Cela fait plusieurs semaines que Clinton suggére qu’Obama n’a pas l’expérience. Qu’il n’est pas prêt à exercer les fonctions de Commander in Chief. Le spot est diffusé le jour même ou Clinton tient un meeting à Waco (Texas) avec des vétérans pour mettre en relief sa crédibilité en matiére e sécurité nationale.

3. Cette vidéo a été immédiatement décodée par la presse comme un remake d’un spot publicitaire (« le téléphone rouge ») que l’équipe de campagne du vice-président Walter Mondale avait diffusée pour contrer Gary Hart lors des primaires démcrats en 1984. (Un plan serré sur un téléphone rouge qui sonne au milieu de la nuit, avec en voix off : ). La presse signale que le concepteur de ce spot dans l’équipe de Mondale, Roy Spence, a rejoint l’équipe de campagne de Hillary Clinton aprés la primare dans le New Hampshire.

Comme le spot anti-Hart de 1984, cette vidéo joue sur le ressort de la peur : Dans un monde dangereux, peut on faire confiance à quelqu’un qui n’a pas l’expérience des relations internationales et de la gestion des crises ?

4. Cette vidéo est un symptôme supplémentaire de la « cinématographisation » de la communication politique. Cete vidéo, comme celle de 1984, renvoie à l’imaginaire filmique de la guerre froide, à tous ces films dans lesquels le Président des Etats-Unis doit gérer, quasiment en temps réel, une crise nucléaire. Point limite (Fail Safe)de Sidney Lumet et Docteur Folamour ( Doctor Strangelove) de Stanley Kubrick, notamment.

5. Assez imprégnée aussi par les fictions nucléaires des années 60, cette représentation d’un Président qui doit prendre des décisions majeures « dans l’instant ». Dans la vie réelle, s’il est probable qu’on réveille le Président en pleine nuit, en cas de crise grave, (« There is a situation, Mister President »), le Président n’est pas pour autant sommé de prendre une décision immédiatement. S’il doit prendre des décisions, c’est aprés que ses conseillers et les membres du cabinet aient pris le temps de faire le point sur la situaion et de lui présenter des options. (West Wing, sur ce plan, est plus réaliste que le clip du téléphone rouge. Le Président n’est pas seul, face à la décision, même s’il lui appartient de trancher, le moment venu, en derniére instance.)