Depuis quelques jours circule sur le net le texte de l’avant-projet de la loi Olivennes, censée lutter contre le piratage, obtenu par un journaliste de Zdnet.
Le texte est en format Microsoft Word, ce qui permet de retrouver facilement l’archéologie du texte, ses modifications. Et moyennant le passage à la moulinette d’un éditeur de texte hexadécimal. d’identifier ses (insolents) contributeurs : les représentants des fournisseurs d’accés.
C’est une pratique discutable mais courante, dans les cabinets ministériels, de faire circuler les projets de loi auprès des groupes d’intérêt concernés, afin de leur permettre de suggérer des modifications.
Une pratique aussi courante que celle qui consiste pour les groupes d’intérêt de soumettre au gouvernement comme aux parlementaires des projets d’amendement complètement rédigés.
Encore faut il éviter de laisser des traces.
Les lobbyistes sont souvent négligents.
En février 2002, les animateurs d’Eurolinux avaient obtenu et rendu publique une version préliminaire d’un projet de directive sur les brevets logiciels. Dans les « propriétés » du document Word, le nom qui apparaissait comme comme « auteur » du document éait celui de Francisco Mingorance, « director of public policy » à la BSA (Business Software Alliance), une association qui représente les intérêts des grands éditeurs américains de logiciel en Europe. Au premier rang desquels, Microsoft (qui faisait, par ailleurs, mais dans une autre direction de la Commission, l’objet d’une enquête pour abus de position dominante). Si le représentant de la BSA n’était évidemment pas le principal auteur du projet de directive, il était patent qu’il était intervenu dans le processsus de rédaction. Et ce, avant même, évidemment qu’elle ait rendu publique et même transmise aux gouvernements.
Contacté par les journalistes de ZDNet, il avait répondu : « Je ne sais pas comment et pourquoi mon nom se retrouve associé à ce document, nous n’avons aucun rapport avec cela. Pour la Commission, il est insultant de dire que quelqu’un d’autre écrit la proposition. ». Apres d’âpres débats, le Parlement Européen retoqua le projet de directive.
Plus récemment, en France, c’est une lobbyiste de Vivendi Universal, Sylvie Forbin, qui avait été prise la main dans le sac.
Alors que le débat faisait rage à l’Assemblée autour du fameux et controversé projet de loi DADVSI (droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information), l’Association des Audionautes avait révélé la version Word d’un amendement qui faisait apparaître le nom de Sylvie Forbin, directrice des affaires institutionnelles et européennes de Vivendi Universal. L’ amendement proposé était tout sauf anodin ; il s’agissait purement et simplement de mettre en cause la responsabilité des éditeurs de logiciels de peer-to-peer dans les échanges et le partage de fichiers sur Internet. Baptisé « amendement Vivendi », vilipendé, cet amendement n’en fut pas moins adopté.