Mr President sur ARTE le 12 octobre

Mr President, un film documentaire 52’ de Emilio Pacull, écrit par Maurice Ronai & Emilio Pacull sera diffusé sur ARTE le 12 octobre à 22h45 dans le cadre d’une soirée Thema La Maison Blanche dans le miroir d’Holywood (Rediffusion le 2 novembre à 14.00 et le 7 à 9.55).

 


<p><a href= »https://vimeo.com/32979938″>Mister President EXTRAIT VF</a> from <a href= »https://vimeo.com/lesfilmsdici »>Les Films d'Ici</a> on <a href= »https://vimeo.com »>Vimeo</a&gt;.</p>

Avec « Mister President » nous poursuivons l’enquête, amorcée, dans « Opération Hollywood » (diffusé sur ARTE en 2004), sur cette manière unique dont la puissance américaine se représente, se met en scène et se projette.
Dans « Opération Hollywood », nous disséquions les relations entre ces deux piliers du pouvoir américain que sont Hollywood et le Pentagone. Nous nous intéressons, cette fois, à l’axe Hollywood-Washington. Les relations entre la Maison-Blanche et les studios ont toujours été étroites. Elles changent de nature quand le Président des Etats-Unis devient un personnage récurrent des fictions hollywoodiennes. Emilio Pacull et Maurice Ronai

Voir aussi : Mr Président : la Présidence au miroir d’Hollywod (Extrait du dossier de presse ARTE-Films d’ici)

Intervenants

Eli Attie : Il fut l’un des speechwriters de Bill Clinton et d’AL Gore. Avant de rejoindre l’équipe des scenaristes de West Wing. Attie est l’un des plus brillants disciples d’Aaron Sorkin. Le personnage de Will Bailey dans West Wing est directement inspiré d’Eli Attie.

Evan Cornog: Doyen, de la Columbia Journalism Review. Auteur de « The Power and the Story: How the Crafted Presidential Narrative has Determined Political Success from George Washington to George W. Bush ».

Dennis Haysbert: Haysbert incarna le Président David Palmer dans quatre saisons de 24 heures, avant d’être assassiné dans la 5 éme. David Palmer incarne un Président démocrate, modéré, intègre, capable. Dans la saison 2, apres un attentat nucléaire sur le territoire américain, il est «révoqué » pour avoir refusé d’ordonner des représailles contre un Etat présumé coupable d’avoir parrainé les terroristes. Belle manifestation de sang froid et de lucidité. Palmer est assassiné dans la saison 5. Dennis Haysbert a critiqué publiquement ce choix narratif. Selon lui, Hollywood devrait arrêter de mettre en scène l’assassinat des présidents (« It buys into the legacy of the country. Every charismatic, wonderful leader we’ve ever had — they’ve shot him. And we could’ve broken that legacy by letting David Palmer live on »).

Rod Lurie : On lui doit trois fictions présidentielles : Deterrence (un Président juif) et le trés intéressant The Contender (Le Président désigne une femme, la Sénatrice Laine Hanson, pour remplacer le Vice-Président. Un sénateur s’oppose à sa nomination et la met en cause pour une vielle une affaire de moeurs lorsqu’elle était étudiante). C’est aussi le créateur et réalisateur de la série Commander in chief qui installe une femme à la Maison Blanche. (Lurie fut écarté de la série après le 7 éme épisode).

Mary McDonnell incarna la First Lady Marilyn Whitmore dans Independence Day. Puis Mary Roslin dans Battlestar Gallactica. (Après la destruction des Douze Colonies de Kobol par les cylons, Secrétaire à l’éducation, seule survivante du gouvernement Adar, Mary Roslin devient Président des Colonies. Une enseignante, une « social worker » au poste de Commander in Chief ! Elle doit prendre des décisions difficiles, comme interdire l’avortement, pour stimuler la croissance démographique des quelques milliers de survivants de la civilisation coloniale).


Trevor Parry-Giles :
professeur à University of Maryland, auteur (avec Shawn Parry-Giles) de « Prime Time Presidency », l’ouvrage de référence sur West Wing.

Joe Trento : Journaliste, auteur de The Secret History of the CIA, 1946-1989 , Prelude to Terror: The Rise of the Bush Dynasty, the Rogue CIA, and the Comprising of American Intelligence (2005), Scapegoat (2006), America and the Islamic Bomb (2007) et Unsafe at any Altitude (2007).


Jonathan Turley, professeur de droit a la George Washington University Law School. Turley a été classé au 38 eme rang des 100 « intellectuels publics » américains les plus cités et au second rang des professeurs de droit des plus cités.

Kenneth Baer, Directeur de Democracy: A Journal of Ideas, il a été speechwriter du Vice President Al Gore. Auteur de Reinventing Democrats: The Politics of Liberalism from Reagan to Clinton (University Press of Kansas, 2000), il enseigne à Georgetown University and at Johns Hopkins University. Il contribue au blog TPMCafe.


John Wells, le producteur de West Wing. Il a créé West Wing avec Sorkin, puis tint les rênes de la série après le départ de Sorkin.

Equipe
Réalisateur Emilio Pacull
Auteurs Maurice Ronai & Emilio Pacull
Image Ralf Oberti
Son Ted Roth
Montage Claire Atherton
Producteur délégué Serge Lalou
Producteur exécutif Mark Edwards
Une coproduction Les Films d’Ici – ARTE France

Produit en association avec
ARTV – Canada
CBC Newsworld – Canada
CinéCinéma – France
ERT S.A. – Grèce
SBS TV – Australie
SF – Schweizer Fernsehen – Suisse
Sogecable – Espagne
SVT – Suède
YLE Co-productions – Outi Saarikoski – Finlande
Avec la collaboration de
la RTBF – Télévision Belge
En coproduction avec
AVRO – Pays-Bas
Avec le soutien de
Centre National de la Cinématographie
Procirep et de l’Angoa-Agicoa
Programme Media de la Commission Européenne

Globe and Mail : A French doc looks at why film and TV presidents are handsome and competent

A French doc looks at why film and TV presidents are handsome and competent, Kate Taylor writes

When French filmmaker Emilio Pacull set out to make a documentary about how American movies and television shows depict the U.S. presidency, he thought he would be offering a critique of Hollywood fantasy, media manipulation and the blurring boundary between TV and reality in the United States. Instead, he discovered that some much-needed idealism might be bleeding from the fictional world into real politics.

« I changed my mind, » said Pacull in French in a telephone interview from Paris, where the Chilean-born director has worked for 35 years. « There is a real democratic force in Hollywood. I thought it was more monolithic but I realized there were individuals who can put forward new ideas…. The impression you are left with at the end of the film is of the great vitality of America and of American TV. »

The film in question is Mr. President, an English-language documentary airing tonight at 10 on CBC Newsworld, which intersperses interviews with political journalists and Hollywood producers with clips from the many depictions of the president on film and TV, from Wag the Dog and The West Wing to Independence Day and 24.

It is part of a trilogy Pacull has in the works: The first part was Hollywood and the Pentagon, an investigation of how the Pentagon seeds positive images of the U.S. military on film in exchange for lending producers the hardware; the third will be about how the relationship between the Pentagon and the White House is represented on film, taking Pacull into the realm of power struggles and coups. But in the meantime, Mr. President addresses the pros and cons of America’s many fictional depictions of its presidency.

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John McCain-Folamour

La vision pessimiste et martiale du monde («There’s going to be other wars. … I’m sorry to tell you, there’s going to be other wars. We will never surrender but there will be other wars.»), ses propos offensifs sur l’Iran, son refus d’envisager toute forme de retrait en Irak (assimilé à une capitulation), la logique « guerre froide » qui transparait quand il évoque la Russie (« Il est absolument nécessaire d’avoir un front uni et d’expliquer aux Russes qu’on ne peut pas être une super puissance ou une puissance au XXIe siècle et se comporter comme une dictature du XXe siècle »), jusqu’au slogan repris dans ses discours de campagne ( We’re Americans. We’re Americans, and we’ll never surrender. They will. ») inscrivent plutôt John McCain dans le sillage des néoconservateurs.

Les polémistes démocrates et les activistes anti-McCain s’efforcent, avec constance, de rattacher McCain à l’imagerie apocalyptique de Dr FolamourComme le montre cette vidéo.

Dr Strangelove occupe, il est vrai, une place de choix dans l’imaginaire géopolitique américain (tel que Hollywood a contribué à le nourrir, mais aussi à le façonner).

On raconte queRonald Reagan, lorsqu’il entra à la Maison Blanche en 1980,  demanda où était la salle de guerre. Il fallut expliquer au nouveau président que cette salle était une pure invention de Stanley Kubrick. Stanley Kubrick a notamment conçu deux figures, le Général « Buck » Turgidson (George C. Scott) et le Général Jack D. Ripper (Sterling Hayden) qui ont servi de matrice pour camper les personnages de « faucons » et de « va-t-en guerre » dans les « films de sécurité nationale » des années 70, 80, 90 et 2000.

Les Présidents de fiction préfèrés d’Obama et McCain

Le public comme les analystes tentent de cerner la personnalité des deux hommes susceptibles d’occuper bientôt le bureau ovale du président des Etats-Unis. Les livres qu’ils lisent («Dites-moi ce que vous lisez, je vous dirai qui vous êtes »), la musique qu’ils écoutent, les films qu’ils aiment… On savait, par exemple, qu’Obama est un fan de la série The Wire.

Entertainment Weekly a interrogé les deux (principaux) candidats à propos de leurs goûts en matière de culture populaire. On y apprend que Barack Obama apprécie le Parrain de Coppola, ‘M*A*S*H, »  »The Dick Van Dyke Show » (ainsi que Frank Sinatra et Sheryl Crow) et John McCain  »Viva Zapata!, » Indiana Jones,  »Seinfeld, »  »The Wire » (ainsi que Roy Orbison et Usher). On ne saura jamais si ces réponses sont spontanées ou si elles sont été lissées par les spin doctors.

Entertainment Weekly leur a aussi demandé leur « Président de fiction » préféré.

Barack Obama cite Jeff Bridges, le Président Jackson Evans dans The Contender de Rod Lurie (Manipulations), un film de 2001. « Ce fut un grand président au cinéma. Plein de charme, il se comporte de honorable. Il a une maniére unique de commander des sandwichs ». A première vue, le personnage de Jackson Evans est aux antipodes de Barack Obama. Politicien chevronné, très direct, bon vivant, boulimique (il enfourne d’énormes Club sandwiches), il joue de son charme mais peut être rude et même brutal.

Le choix d’Obama n’en est pas moins intéressant, quant à la vision qu’il se fait (le « caractére ») d’un « bon Président ».

Dans le film de Rod Lurie, le Président Jackson Evans doit désigner un vice-président pour succéder à celui qui vient de mourir subitement.
Il désigne une femme, la sénatrice Laine Hanson (Joan Allen). Fille de parlementaire, elle réunit toutes les qualités requises. Le leader Républicain au Sénat, Shelly Runyon (Gary Oldman) entreprend d’ empêcher sa désignation. Il va jusqu’à exploiter des photos compromettantes de celle-ci, jeune étudiante, au beau milieu d’une partouze. Laine Hanson, sommée de s’expliquer mors d’une audition publique refuse refuse de s’expliquer sur des aspects de vie privée qui, estime-t-elle, n’ont pas à être mélangés à sa vie publique. Malgré le scandale , le Président Jackson Evans révèle de surprenantes qualités morales, maintenant jusqu’au bout son soutien et sa confiance à la sénatrice, malgré le silence obstiné dans lequel elle s’enferme, et l’impasse dans laquelle elle le place. (Obama a rencontré une fois Rod Lurie : il lui avait confié, en privé, l’affection qu’il éprouvait pour Jackson Evans-Jeff Bridges.)

John McCain, pour sa part, affiche sa préférence pour le Président de 24 heures, David Palmer. « Il est fabuleux. Il doit prendre des décisions difficiles, il assume, il est prêt à sacrifier son intérêt au nom de l’intérêt du pays. »

Spontané ou calculé, le choix est habile. McCain cultive son côté indépendant et « franc-tireur » en retenant un Président à la fois noir et démocrate. Suspecté d’être colérique et va t’en guerre (« Bomb bomb Iran »), McCain se donne en modèle un Commander in Chief qui fait preuve de retenue dans la gestion des crises. (Dans la Saison 2, David Palmer refuse d’ordonner des représailles contre un Etat arabe suspecté, mais sans preuves, d’avoir orchestré un attentat terroriste aux Etats-Unis).

Choix paradoxal, aussi : David Palmer couvre de son autorité les techniques extrêmes d’interrogatoire de Jack Bauer, alors que McCain, l’ancien prisonnier de guerre, avait contesté le recours à la torture.

Ralph Nader acteur de sitcom

La campagne de Ralph Nader promeut sur Youtube une étrange vidéo « The Obama Girl and Ralph Nader Show »: un hybride de sitcom et de comédie musicale.

Cette vidéo, promue par la campagne Nader, présente comme le premier épisode d’une sitcom met en scène Ralph Nader et la fameuse Obama Girl. Nader partage un bureau avec Obama Girl. Elle conseille à Nader de muscler ses messages. La vidéo met également en scène l’ex-Gouverneur du Minnesota indépendant, Jesse Ventura (et ex-catcheur).

West Wing Saison 8 : Let McCain be McCain

Dans l’un des premiers épisodes de The West Wing, le Président Jed Bartlet et Leo McGarry discutent de la difficulté à agir et faire valoir des convictions quand on dépense toute son énergie négocier des compromis avec tout le monde. Le Président a encore perdu 5 points dans les sondages. Un article incendiaire soulignant le manque de cohésion de l’équipe est sur le point d’être publié. Léo annonce au Président qu’il est temps de défendre les valeurs auxquelles il croit. Ils décident ensemble de passer à l’action, de faire prévaloir leurs convictions et les engagements de campagne sur l’objectif d’un second mandat.
« Avez vous une stratégie pour cela ? »
demande le Président. « Let Bartlet be Barlet » répond Léo.

La journaliste républicaine, Peggy Noonan, qui a collaboré à West Wing comme consultante, avait ce dialogue mémorable à l’esprit quand elle a publié en juin dernier, dans le Wall Street Journal, une tribune titrée « Let McCain be McCain ». Dans ses relations avec les journalistes comme dans ses interventions à la télévision, elle y conseille au candidat républicain d’être lui-même.

West Wing Saison 8/ Jed Barlet à Barack Obama "Soyez en colère, ce sont des menteurs !"


L’éditorialiste Maureen Dowd (qui fut la compagne d’Aaron Sorkin et inspira, semble t il, le personnage de la journaliste Karen Cahill dans l’épisode The Leadership Breakfast-Saison 2) a imaginé une rencontre entre Barack Obama et Jed Barlet.

Ces dialogues imaginaires ont été publiés dans le New Tork Times au lendemain de la Convention Républicaine. Lire la suite

Mr Président : la Présidence au miroir d’Hollywod

Extrait du dossier de presse ARTE-Films d’ici

America’s politics would now be also America’s favorite movie, America’s first soap opera, America’s best seller.
Norman Mailer

Jusqu’aux années 90, le cinéma américain ne mettait en scène la figure du président des Etats-Unis que par intermittence.
Le POTUS (Président of United States) est désormais présent dans un très grand nombre de films. Comme personnage principal, ou au second plan.

Près d’une centaine de films et séries TV depuis le début des années 90.

Les fictions présidentielles traversent tous les genres: comédie romantique, film policier, science-fiction, film catastrophe, thriller politique… Elles mettent en scène des présidents réels (« historiques » ou contemporains) et des Présidents imaginaires (inventés de toutes pièces ou directement inspirés de présidents réels).

Le Président entraîne, à sa suite, tout un cortège de personnages: sa famille, les agents du Secret Service, le Chief of Staff, le conseiller de sécurité nationale, le Chef d’Etat Major interarmées, son équipe, certains voire tous les ministres de son Cabinet, le vice-président.

Pour bâtir leurs récits, les scénaristes font appel à des conseillers ayant travaillé à la Maison-Blanche. Ils puisent dans l’histoire récente ou dans l’actualité la plus brûlante : ils activent ou raniment des controverses de politique intérieure.

L’irréalisme des situations dans lesquels les scénaristes plongent les présidents n’exclut pas un souci scrupuleux dans la reconstitution des lieux (de l’aménagement intérieur d’Air Force One à la topographie du 1600 Pennsylvania Avenue). Ces fictions se déploient dans la quasi-totalité de la Maison-Blanche : elles nous font pénétrer dans la Bedroom présidentielle comme dans la Situation Room.

Les épreuves auxquelles Hollywood soumet les présidents, les situations dans lesquelles elle les plonge, mettent à jour les craintes, les doutes, comme la confiance en elle-même de la société américaine: son exceptionnelle vitalité mais aussi ses zones d’ombre.

Combinant extraits de films et de séries télévisées, archives, interviews, tournages sur les hauts lieux de cette géographie présidentielle, nous nous proposons d’explorer les ressorts et les recettes de cette « fabrique de présidents ».

Trois fils directeurs

Trois fils directeurs nous guident à travers l’exploration de cette « fabrique de Présidents ».

Le premier fil directeur s’inscrit à l‘intérieur de la double économie, commerciale et narrative, d’Hollywood.
Economie commerciale : pourquoi les studios produisent-ils des films Présidentiels et surtout pourquoi en produisent-ils autant ? Economie narrative : comment les Présidents sont-ils mis en fiction ?
On s’intéresse en particulier à cette logique de « récurrence » qui se met en place, de fiction présidentielle en fiction présidentielle, depuis plus de 40 ans. Récurrence des situations auxquelles le chef de l’exécutif est confronté ou qu’il doit surmonter.
Récurrence, aussi, des acteurs qui incarnent, de film en film, le Président. Récurrence, enfin, du décor de la Maison-Blanche.
Une logique quasi-feuilletonesque, qui confère aux fictions présidentielles tous les traits d’une série. Et ce, avant même que la télévision ne transforme, avec « West Wing » et « Commander in Chief » la série des fictions présidentielles en séries-TV présidentielles.

Le second fil directeur est politique. Il procède d’un constat : les fictions présidentielles au cours des quinze dernières années (et singulièrement depuis le 11 septembre) accorde une place prééminente aux prérogatives internationales et militaires du POTUS.
La « fabrique des présidents » met en scène et théâtralise le Président dans son rôle constitutionnel de « Commander in Chief ». Elles nous font vivre ou revivre les grands moments de la Guerre Froide, les « conflits de basse intensité » des années 70, les « guerres humanitaires » des années 90, les « opérations spéciales » de la lutte antiterroriste. Elles brassent, entremêlent souvent , les ennemis d’hier et ceux d’aujourd’hui.

Le troisième fil directeur nous conduit à observer les télescopages qui s’opèrent entre les « fictions présidentielles » et la vie politique réelle. On s’interroge, sur les effets proprement politiques des fictions présidentielles.

La Fabrique des Présidents

Les Pères Fondateurs avaient souhaité limiter les pouvoirs du Président. Ils seraient surpris de voir la place centrale que le Président occupe aujourd’hui dans le système politique américain. Et ils seraient surpris de découvrir toutes les choses qu’il peut faire dans les films.

Voici quelques recettes pour le succès d’une fiction.

Les acteurs-présidents

Le choix des acteurs contribue à cette impression de feuilleton.
Ainsi, Martin Sheen a interprété le Chief of Staff d’un président, Robert Kennedy, John Kennedy, avant d’incarner Josiah exécutif.
Alan Alda joue le Président dans « Canadian Bacon » (1995), puis le candidat républicain dans « West Wing », en 2006.
Cette surexposition de la figure présidentielle au cinéma se prolonge à la télévision avec « West Wing » (sept saisons, 1999-2006), « Commander in chief » et « 24 heures » (sept saisons, depuis 2001). 24 heures a d’ores et déjà « consommé » quatre présidents: David Palmer, John Keeler, Charles Logan et Wayne Palmer.

Une géographie du pouvoir : 1600 Pennsylvania Avenue

L’unicité du lieu « Maison-Blanche » renforce cette impression de « continuité » des « films présidentiels ». Plusieurs studios disposent de répliques du 1600 Pennsylvania Avenue, plus ou moins précises. « Le Président et Miss Wade » en 1995 a pu être tourné dans le décor qui avait été créé, avec un grand souci du détail, pour « Dave », en 1993. C’est ce décor de la Warner à Burbanks qui a permis de produire, au meilleur coût, le pilote de « West Wing ». Pour les besoins de « West Wing », ce décor a été agrandi et compte désormais parmi les plus imposants du monde. Il a été utilisé depuis pour les tournages de Contact, de « Mars Attacks! » et de « Independence Day ».

Dramaturgies de la Puissance: Le « Commandant en chef »

En situation de guerre, ou de crise, le centre du pouvoir se déplace vers la Maison-Blanche. Le Congrès passe au second plan. Tout remonte vers le Commandant en chef des armées. La Présidence se fait « impériale ».

La bombe atomique avait magnifié les présidents Truman et Eisenhower en maîtres du feu nucléaire. La crise des missiles et celle de Berlin confortent la posture « impériale » de John Kennedy .

Les bases de cette double dramaturgie de la Puissance américaine et de la Présidence ont sans doute été jetées par deux films produits sous la Présidence Kennedy : « Fail-Safe » et « Dr. Strangelove ». Ces deux films placent le Président au coeur d’une crise nucléaire.

En observant avec attention les fictions présidentielles, (singulièrement depuis le 11 septembre), tous genres confondus, nous voyons qu’elles accordent une place prééminente aux prérogatives internationales du chef de l’exécutif : commandant en chef des armées et chef de la diplomatie.

Le Commandant en chef va t il se ranger à l’avis des « Faucons » ou à celui des « Colombes » ?

Caractère, sang-froid, lucidité: les fictions présidentielles dressent ainsi le portrait-robot du « bon Président ». Elles invitent les spectateurs, qui sont aussi des électeurs, à réfléchir sur le type de personne idéale pour jouer ce « rôle ultime ».

Quand le réel dépasse la fiction

Les apparitions télévisées du Président des Etats-Unis mobilisent désormais des techniques directement empruntées à Hollywood. Décor en toile de fond, éclairages, angle des caméras : tout est fait pour mettre en valeur le Président. Amorcée sous Reagan, cette orchestration hollywoodienne de l’imagerie présidentielle a atteint des sommets sous la Présidence Bush. Ses conseillers en communication se sont assurés les services de Scott Sforza, un ex-producteur de la chaine ABC. Rien n’est laissé au hasard.

Sforza a confirmé que pour le discours anniversaire du 11 septembre, les équipes du Président Bush avaient loué trois barges de projecteurs Musco des équipements de lumiere habituellement utilisés pour éclairer les stades et les concerts rock géants.

Lors d’une allocution télévisée en direct du Mont Rushmore, les équipes de la Maison Blanche ont placé les caméras de manière à ce que le profil du Président s’aligne dans la continuité des quatre Présidents.

« Mission accomplie »

Tout le monde a en mémoire l’arrivée en avion du Président Bush à bord du porte-avions nucléaire USS Abraham Lincoln le 1er mai 2003. Le président y annonçait la fin des « opérations de combats majeures ». La tour de commandement du navire arborait une banderole «Mission Accomplished».

L’arrivée en jet, le choix de l’uniforme : cette mise en scène très calculée du Président en chef de guerre parmi ses troupes évoquait irrésistiblement Top Gun (mais aussi le Président Pulman d’Independence Day…)

Jonathan Turley commente cet épisode dans le film :
« George Bush inverse la façon dont sont construites les images présidentielles. Avant, c’était Hollywood qui caricaturait les présidents. Aujourd’hui, c’est comme si le président Bush amenait directement Hollywood dans le bureau ovale. »

Josiah Bartlet : la Présidence virtuelle

Certaines fictions présidentielles opèrent sur le registre de l’évasion face à une réalité politique insatisfaisante. C’est le cas de « West Wing ».
Cette série a démarré en 1999. A partir de l’élection de George Bush Jr, en 2000, « West Wing » (qui durera sept saisons) bénéficie d’audiences exceptionnelles pour une série aux scénarios sophistiqués et aux dialogues exigeants : elle suscite des phénomènes très singuliers d’adhésion dont témoignent toute une série de blogs.

Visiblement, dans cette « fiction consolatrice », une partie du « peuple démocrate » se sentait mieux gouvernée et représentée par ce Président « virtuel ». Les téléspectateurs républicains pouvaient eux aussi adhérer à un Président libéral qui faisait preuve d’autorité, et à une série qui mettait en relief des Républicains vertueux (comme l’adversaire de Matt Santos, incarné par Alan Alda, dans les épisodes 6 et 7).

Selon les mots de John Wells, producteur de « The West Wing » et auteur de nombreux épisodes clés avec Aaron Sorkin :

« Le personnage de Bartlet est devenu une synthèse de toutes nos espérances, de tous les rêves que nous avions pu faire depuis l’adolescence ; c’était la personne pour qui on avait envie de voter. Et quand on trouvait qu’on en donnait une vision un peu trop idéalisée, on faisait marche arrière. Je ne voudrais pas donner l’impression d’être d’un optimisme béat, mais on se disait que si on arrivait à montrer quelqu’un qui répondait à nos attentes, aux attentes et aux espoirs des gens, peut-être que les hommes politiques auraient envie de s’élever un peu, de tendre un peu vers cette image. Ce qui a été le cas d’ailleurs. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre d’hommes politiques qui sont venus visiter les studios de « West Wing » et qui se sont fait prendre en photo avec Martin Sheen ; comme si le simple fait d’être à côté de ce personnage de fiction pouvait améliorer leur propre image. »

Présidentielles 2008 : Hollywood imagine le futur

La concordance de la diffusion de la série « Commander in chief » avec la pré-candidature d’Hillary Clinton a suscité un débat sur la capacité d’une fiction à faire évoluer l’opinion américaine quant aux capacités d’une femme à présider.

Dans cette série (qui a d’ailleurs été interrompue, faute d’audience), on voit une femme accéder à la fonction suprême, suite au décès du Président. Pour asseoir sa légitimité de Chef des armées, elle est amenée à nommer un général au poste de vice-président.
Cette série n’est pas un cas isolé : l’hypothèse d’une Présidence féminine a été esquissée dans plusieurs films tout au long des années 90.

L’apparition de Présidents noirs, intègres et responsables (Morgan Freeman-Tom Beck dans “Deep Impact” ou encore à Dennis Haysbert-David Palmer dans « 24 heures ») a-t-elle préparé les esprits à la candidature de Barack Obama ?
L’élection de Matt Santos (dans la saison 7 de « West Wing ») préfigure-t-elle l’élection d’un Président latino en 2012 ou 2016 ?

Tous ces troublants chassés-croisés suggèrent que la ligne de partage entre la « politique réelle » et ses représentations filmiques est de plus en plus ténue.

Mr President sur la RTBF lundi 29 septembre 22:20

Jusqu’aux années 90, le cinéma américain ne mettait en scène la figure du Président des États-Unis que par intermittence. Aujourd’hui, il est désormais présent dans un très grand nombre de films, comme personnage principal ou au second plan, dans près d’une centaine de films et de séries TV. Les fictions présidentielles traversent tous les genres : comédies romantiques, films policiers, science-fiction, films catastrophes, thrillers politiques…

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