Le mathématicien Vincent Pavan est devenu l’un des visages de la mouvance covido-sceptique. Il mène avec constance, depuis le printemps 2020, une croisade contre la politique sanitaire, les vaccins anti-covid, les modèles et les modélisateurs. Avec Louis Fouché, il était le chef d’orchestre du grand rassemblement des covido-sceptiques, les 18 et 19 mai 2023, à Saintes. Un « ex-pair », selon l’expression du sociologue des sciences Yves Gingras: un de ces scientifiques qui, « à un moment donné de leur carrière, ont dérapé sérieusement et se sont mis à propager des idées incompatibles avec le consensus scientifique, c’est-à-dire avec l’état actuel des savoirs les mieux validés». Retour sur une trajectoire de radicalisation.
Lire la suiteArchives pour la catégorie Covid19
Quel intérêt l’eurodéputée Michele Rivasi peut-elle bien trouver à dialoguer avec Pierre Chaillot ?

La tournée de promotion de Pierre Chaillot autour de son livre covido-sceptique Covid 19, ce que révèlent les chiffres officiels a pris un tour inattendu avec un débat en livestream organisé le 13 avril par l’eurodéputée écologiste Michele Rivasi dans une salle du Parlement européen. Dans ce livre qui caracole depuis plusieurs semaines en haut du classement des ventes en France, Pierre Chaillot s’attache à démontrer, en 471 pages, que le Covid n’a causé aucune surmortalité, que la France n’a connu aucune saturation hospitalière, qu’il n’y a pas eu de malades, et très peu de cas, que ce sont les confinements qui ont tué, relayés ensuite par les vaccins. Luc Peillon, dans Libération, a fait l’effort de vérifier et de réfuter « le grand théâtre covido-sceptique de Pierre Chaillot » et tout récemment Nicolas Berrod dans le Parisien.
Lire la suiteDonnées et modèles dans le gouvernement de l’épidémie
Article publié dans le numéro de le N° 21 de la revue Enjeux numériques-Annales des Mines: Données et modèles : Technopolitique de la crise sanitaire

Par Maurice RONAI et Aymeril HOANG
Première grande pandémie du XXIe siècle, la crise du Covid-19 a révélé l’impréparation des systèmes de santé et les limites de la « transformation numérique » des administrations. Cette « crise des données », inégale selon les pays, a donné lieu à une mobilisation sans équivalent : modélisations, foisonnement d’enquêtes, construction dans l’urgence de systèmes d’information, exploitation de nouvelles sources de données, accélération de la production statistique, enquêtes répétées de prévalence sur des échantillons de la population, déploiement de dispositifs pour la recherche et le suivi des contacts.
Lire la suiteGestion numérique de la crise sanitaire : quelques enseignements
Article publié dans Au-delà des enjeux, quels avenirs ? Annales des mines-Enjeux Numérique N° 20, Décembre 2022

La crise du Covid-19 est la première grande pandémie du XXIe siècle. Nous n’avons pas fini d’en analyser les conséquences. Parmi d’innombrables enseignements, elle a constitué le premier test majeur de la capacité du « numérique » à nous permettre de faire face aux épisodes de confinement et aux restrictions de déplacement.
C’est aussi la première crise sanitaire gérée numériquement. De bout en bout. Enfin presque : surveillance de l’épidémie, modélisations, pilotage des capacités hospitalières, téléconsultation, mise en œuvre des campagnes de test, puis du vaccin, traçage des contacts, suivi des patients à distance.
Lire la suiteChronique de la crise sanitaire (Mars 2020-2023)
J’ai profité de l’été pour compiler et rassembler sur une seule page les divers textes que j’ai consacrés à la gestion de la crise sanitaire.
Dans Libération
Pour faire la guerre au virus, armons numériquement les enquêteurs sanitaires
Pourquoi se focaliser sur une application qu’il faudra discuter à l’Assemblée nationale et qui risque de ne jamais voir le jour, alors que nous devrions déjà nous concentrer sur la constitution et l’outillage numérique d’une véritable armée d’enquêteurs en épidémiologie ?
Tribune de Didier Sicard, Président d'honneur du Comité National d'Ethique, Benoit Thieulin, ancien président du Conseil national du numérique, Maurice Ronai, ancien commissaire à la Cnil, Godefroy Beauvallet, ancien vice-président du Conseil national du numérique et Sophie Pène, Professeure à l'Université Paris Descarte
N° 21 de la revue Enjeux numériques-Annales des Mines: Données et modèles : Technopolitique de la crise sanitaire
- Introduction : Données et modèles dans le gouvernement de l’épidémie
- Dr Tableur & Mr. Excel. Les outils de structuration souple des données dans la crise sanitaire
- Technopolitique d’une crise sanitaire (Etats-Unis, Allemagne, Japon, Royaume Uni)
- Épidémiologie participative : quand le public participe à la surveillance et à la compréhension du Covid-19
Enjeux numériques-annales des Mines n° 14 – Juin 2021 – Réponses numériques à la crise sanitaire
- Quand tout doit se faire à distance i(introduction du numéro)
- La numérisation à marche forcée du système de santé face à la Covid-19
- La construction accélérée d’un système d’information épidémiologique
- Covid-19 : le volontarisme numérique public au pied du mur (avec Godefroy Beauvallet)
Covid-19 : wikipédia fait figure d’îlot de rationalité dans un océan de rumeurs
Article initialement publié sur ConspiracyWatch
Le respect des principes, règles et recommandations de l’encyclopédie collaborative en ligne a permis qu’elle ne se transforme pas en caisse de résonance des théories complotistes autour de la pandémie de coronavirus.
Montage CW.
Quand on cherche « coronavirus » ou « Covid-19 » dans un moteur de recherche, les articles de Wikipédia apparaissent, comme beaucoup d’autres requêtes, en tête des résultats. Cela tient au mode de fonctionnement des moteurs qui privilégient les sites très visités (Wikipédia fait partie des dix sites web les plus consultés dans le monde) et qui disposent de nombreux liens entrants et sortants. Lire la suite
Nous avons fait une erreur avec les masques. Nous risquons de la rééditer pour les tests
Article lumineux d’un médecin, Aaron E. Carroll, dans le New York Times
Pour les masques comme pour les tests, les médecins-cliniciens exigent des performances élevées (ils traitent les patients un par un) alors que les experts en santé publique se satisfont de performances moyennes voire médiocres (ils se concentrent davantage sur les populations, et donc sur les volumes, que sur les individus).
Il souligne aussi (comme Catherine Hill en France) l’intérêt des « tests groupés ».
Nous avons fait une erreur au début dans la façon dont nous parlions des masques. Nous faisons la même erreur maintenant avec les tests.
La discussion sur ces questions met en évidence les différentes manières de penser des cliniciens et des experts en santé publique. Les cliniciens – les médecins, comme moi – traitent les patients un par un. Notre responsabilité est envers cette personne. C’est la réflexion qui a conduit beaucoup d’entre nous à se concentrer uniquement sur les masques N95 (FFP2) les plus efficaces au début. Nous savions que nous n’en avions pas assez pour les travailleurs de santé et nous savions que les masques faits maison ne fonctionneraient pas que les FPP2, aussi bien au bureau ou à l’hôpital. Nous avons donc dit aux gens de ne pas les utiliser.
En février dernier, j’ai demandé aux gens sur Twitter de ne pas «gaspiller» les masques, de «les laisser à ceux qui en ont vraiment besoin».Bien sûr, nous savons maintenant que le message était erroné. J’aurais dû m’appuyer davantage sur ma formation en santé publique. Les experts en santé publique se concentrent davantage sur les grands groupes que sur les individus. Ils n’est pas nécessaire, pour eux, que les masques fonctionnent parfaitement pour tout le monde. Ils sont ravis de voir un avantage moindre dans une population plus importante. Et il existe des modèles montrant que si les masques sont efficaces à environ 60%, moins des trois quarts des personnes auraient besoin de les porter pour contrôler une maladie comme le Covid-19.
Aujourd’hui, nous risquons de faire la même erreur avec les tests.
La suite sur Quelle force sanitaire ?
Commission d’enquête de l’assemblée sur la gestion de la crise sanitaire : premier bilan
Déjà six auditions par la commission d’enquête de l’assemblée sur l’impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l’épidémie de coronavirus – covid 19.
Jérôme Salomon, directeur général de la santé, Geneviève Chêne, directrice générale de Santé publique France, Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, Benoît Vallet, directeur général de la santé de 2013 à 2018, Jean-Yves Grall, directeur général de la santé de 2011 à 2013.
Le format des commissions d’enquête à la française n’a rien a voir avec celui des Hearings du Congrès.
Un tour de parole qui impose aux députés de poser plusieurs questions à la fois, des questions souvent imprécises…
Ce qui permet aux personnes auditionnées de ne pas répondre, de répondre à côté…. Ou de manière très vague.
On apprend pas mal de choses, mais beaucoup restent dans l’ombre.
Les questions des députés membres de la Commission d’enquête portent principalement sur la pénurie de masques (gestion des stocks, dégradation des stocks, qui est responsable ?) et de tests. Et sur la gestion de la crise dans les Ehpad.
Aucune question sur la gestion de la phase 3 : notamment sur l’interruption de la recherche de contacts (pourquoi ?) sur le fait qu’on renvoyait des gens possiblement infectés chez eux dès lors qu’ils présentaient des symptômes peu sévères (au risque de contaminer leurs proches).
Aucune question sur la « brigade sanitaire » : son déploiement (tardif ou pas), sur son efficacité, sur son dimensionnement face à une éventuelle seconde vague (3500 agents de la CNAM : est-ce suffisant en cas de redémarrage ?)
Aucune question sur l’intérêt de déployer des équipes mobiles du type Covisan (test, recherche de contacts, isolement, accompagnement médical mais aussi social).
Aucune question sur le fait qu’on ait attendu aussi tard pour proposer des solutions d’hébergement aux personnes pour qu’elles évitent de contaminer leur entourage. Et plus généralement sur la question de l’isolement des personnes contaminées.
Pas une seule question sur la qualité des connaissances dont disposaient les décideurs (nationaux, territoriaux) pour le pilotage de la crise. Ni sur les moyens dont ils se sont dotés ou pas pour améliorer cette connaissance.
Pas une seule question sur ce que l’on savait ou pas des conditions dans lesquelles les personnes se contaminaient (ou ? comment ?).
Aucune question sur les moyens dont on s’est doté (ou pas) pour connaître la part de la population porteuse du virus (via des tests hebdomadaires, voire quotidiens sur un échantillon de la population) ?
Aucune question sur l’existence ou pas d’une cartographie fine des cas de contaminations pour savoir quels villes/quartiers tester en priorité ou pour savoir où il convient de déployer des drives.
Aucune question sur le groupage des tests (intérêt, faisabilité).
Aucune question non plus sur la gestion de la crise par les modèles. Ni sur la pertinence de ces modèles (et leur hypothèses très simplificatrices de propagation homogène sur un territoire).
Disposons-nous des données nécessaires pour piloter le déconfinement ?
La gestion de la crise sanitaire repose assez largement sur deux macro-indicateurs : le taux de reproduction et le nombre de nouvelles contaminations quotidiennes. L’institut Pasteur vient de nous apprendre qu’autour de 3 900 personnes ont probablement contracté le virus (avec une fourchette allant de 2 600 à 6 300 personnes) : le même modèle prévoyait plutôt 1 300 infections quotidiennes (entre 840 et 2 300) en ce début de semaine. Le taux de reproduction est, pour sa part, passé de 0,5 à 0,65 et 0,7 On sait que les modèles sont des constructions fragiles. C’est sur la base de ces deux macro-indicateurs que le gouvernement pourrait être conduit, s’ils remontaient,, à re-durcir les mesures de restriction. Il faut qu’il ait confiance dans la pertinence de ces indicateurs et dans leur valeur prédictive. Et la société avec lui (même s’ils ne sont pas rendus publics). Lire la suite
Disposons nous de la bonne organisation pour contrôler la circulation du virus ?
Les centres d’appels de la CNAM risquent d’être vite débordés si les médecins jouent le jeu et transmettent à la CNAM les « contacts » que les personnes testées positives auront accepté de leur communiquer. Et s’ils ne sont pas débordés, c’est que le dispositif aura manqué sa cible.
L’expérience des épidémies nous enseigne qu’il faut des « travailleurs de santé », en nombre, professionnels et volontaires pour casser les chaînes de transmission. Pour identifier et circonscrire les foyers (nouveaux mais aussi anciens) de propagation. Pour identifier et isoler, le cas échéant, les « propagateurs potentiels » du virus que sont les personnes en contact chaque jour avec des centaines de personnes
Le dispositif des 3000 agents dans les centres d’appel de la CNAM, même renforcés par les 200 épidémiologistes des ARS est-il dimensionné pour faire face a cette mission ?
Ne conviendrait-il pas de s’inspirer du dispositif mis en place en Autriche, avec ces ambulances qui circulent à Vienne, prêtes à se rendre au domicile d’une personne qui manifeste des symptômes avancés de la maladie ? Est il prudent d’attendre que cette personne obtienne un rendez-vous avec son médecin (24h), que celui-ci lui recommande d’aller se faire tester, qu’elle le fasse le lendemain, puis attendre encore 24 ou 48 heures avant d’en connaître les résultats pour qu’un médecin ou un agent de la CNAM la contacte, lui prescrive les mesures d’isolement appropriées (et lui signe un arrêt de travail) ? C’est une course de vitesse.
Faut-il attendre qu’un facteur manifeste les signes de la maladie pour qu’il aille se faire tester ? Ne serait-il pas plus prudent de mener des tests de manière proactive auprès des contrôleurs SNCF ou RATP, enseignants, pharmaciens, commerçants, postiers, agents dans les guichets, conducteurs, policiers, bénévoles assurant des distributions, et bien sûr acteurs de santé…
Faut-il attendre que plusieurs personnes dans une entreprise, dans une prison, dans un foyer de travailleurs manifestent les signes de la maladie pour identifier un foyer de propagation ? Ne conviendrait-il pas d’étendre le dispositif Covisan, mis en place par l’AP-HP, pour aller au-devant de ces foyers, avec des unités de dépistage mobiles ? Et s’appuyer, outre les médecins de villes, sur les infirmiers et infirmières libéraux, les centres médicaux sociaux ou les CPTS, les communautés territoriales de santé.
Il convient, d’ores et déjà, d’imaginer un dispositif d’équipes mobile pour aller au-devant des foyers de transmission pour éteindre les départs de feu.